lundi 22 décembre 2014

Que faire pendant les vacances ?



Pour ceux qui le souhaitent, et je le conseille vivement à ceux qui ont eu 08 ou moins au premier DST, vous pouvez, pendant les vacances, en plus des révisions pour les oraux, faire un ou plusieurs des exercices suivants, à me rendre à la rentrée (il faut que je puisse les corriger avant le prochain DST du samedi 24 janvier) :

Commentaire : Exercices 1 à 4 p.580/581 de votre manuel
Dissertation : exercices au choix dans les pages 594/595, vous pouvez ne rédigez qu'une des deux parties de la dissertation

Sinon, voici un sujet possible, dont vous trouverez le corrigé sur Internet. Je vous invite, si vous le souhaitez, à y réfléchir et à construire un plan détaillé ainsi qu'une introduction complète rédigée... sans vous aider du corrigé dans un premier temps !

Dans son Essai sur le roman, Georges Duhamel écrit : "Le but suprême du romancier est de nous rendre sensible l'âme humaine, de nous la faire connaître et aimer dans sa grandeur comme dans sa misère, dans ses victoires et dans ses défaites. Admiration et pitié, telle est la devise du roman." 
Vous discuterez ce point de vue en vous inspirant des romans que vous connaissez.

mercredi 17 décembre 2014

ORAUX BLANCS : textes



Je vous redonne les liens vers les 6 textes que vous devez présenter à l'oral vendredi 19, qui sont les mêmes que pour les oraux blancs de janvier.
Vous avez droit en classe vendredi à vos versions surlignées, mais pas en janvier !

Vous trouverez aussi les fiches de séquences, qui récapitulent les connaissances à savoir pour chaque séquence.

 N'oubliez pas de bien relire vos textes complémentaires.
Je vous mets le lien vers les textes de Vauquelin et Baudelaire pour la séquence sur Dom Juan ; la fin de la pièce de Tirso de Molina est dans vos livres.

Pour la séquence 2, celle sur Laclos, les textes de Crébillon et Sade sont en photocopies dans vos cours (je ne les ai pas scannés). Je vous renvoie vers le corrigé proposé dans cet article pour ces 2 textes complémentaires.

Il faudra imprimer tout ça en double exemplaire pour les oraux blancs, et pour le bac bien sûr !
A vendredi, bon courage à tous pour ces derniers jours



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dimanche 14 décembre 2014

corpus libertinage : Crébillon et Sade

 (Fragonard, Jeune fille jouant avec un chien)

Je vous propose la question sur corpus parfaitement rédigée par Claire S. (1e S1) à partir des textes de Crébillon et Sade. Vous remarquerez la grande rigueur méthodologique avec laquelle la réponse est construite ! La longueur de réponse pour une question sur corpus est très bien aussi. 
Que cela vous serve d'exemple pour le DST de janvier !



[intro, qui comment par une accroche] La philosophie matérialiste de Gassindi et la nouvelle remise en question de la religion a donné naissance, au XVIIIe siècle, au libertinage de mœurs. [présentation rapide du corpus] Le corpus soumis à notre étude propose un extrait de Lettres de la Marquise de M*** au Comte de R*** publié en 1739 par Claude Crébillon et un extrait de La Philosophie dans le boudoir écrit par le Marquis de Sade et publié en 1795. [question problématique] Nous pouvons nous demander quelle définition du libertinage ces documents proposent.

[1er argument] Tout d’abord, on retrouve de l’aversion pour la religion. En effet, dans le texte de Sade, la religion est qualifiée deux fois « d’imbécile » et les chrétiens sont mis en opposition avec « l’homme puissant ». en revanche, si les libertins niaient l’existence de Dieu, ils se disaient dirigés par l’instinct. On retrouve en effet l’évocation de la « nature » à quatre reprises dans le texte de Sade et une fois dans le texte de Crébillon, avec, de plus, des expressions comme « vous avez reçu de la nature » et « vous n’étiez pas fait pour ». [bilan de l’argument] Les libertins se posent ainsi en tant que victimes de leur instinct primitif. Ils ne sont donc pas blâmables !

[2e argument] De plus, les libertins se considèrent comme des être supérieurs. Le narrateur de La Philosophie dans le boudoir se désigne ainsi comme « l’homme puissant » et « le plus fort », et dans la lettre, la marquise de M*** se pose elle-même en tant que « victime » et « objet dont vous êtes le maître ». Dans le texte de Crébillon, le libertin semble être hautain envers la femme qu’il a séduite, comme le montre le champ lexical de l’attachement : « empressements », « attentif », qui sont niés, et « indifférence ». [bilan de l’argument] Le libertin est donc supérieur à ses conquêtes.

[3e argument] Enfin, l’aspect le plus marquant du libertinage est la cruauté. On retrouve par exemple, dans le texte de Sade, le verbe « délecter » à plusieurs reprises associé au nom « peine ». on relève aussi les mots « cruelle » et « tourmenter » dans le texte de Crébillon. Faire souffrir les autres semble être jouissif ; c’est ainsi qu’à la souffrance est associé le champ lexical du plaisir : « délecter », « très grand plaisir » chez Sade, « passion », « plaisir » et « jouir » chez Crébillon. [bilan de l’argument] Ainsi, faire souffrir autrui est une jouissance chez le libertin. Sade fait même l’éloge de la cruauté en affirmant qu’elle est naturelle !

[conclusion/bilan très rapide] Ces deux documents montrent donc l’aversion des libertins du XVIIIe siècle pour la religion, l’influence de la nature sur eux, leur orgueil et surtout leur cruauté.

mardi 9 décembre 2014

Devoirs et interro



Pour lundi 8 décembre
 Répondre aux questions suivantes sur la lettre 81 (extrait distribué en classe) des Liaisons dangereuses, dans le cadre de la première séance de la séquence 3 sur la condition des femmes :


  • Que cherche à cacher Mme de M. ? Pourquoi ? Repérez les différentes étapes de sa transformation.
  • En quoi la « science » développée par Mme de M. lui est-elle utile ?
  • Dans quelle mesure l’héroïne fait-elle son propre éloge ? analysez les procédés qui lui servent à affirmer sa puissance.
  •  En quoi la démarche de cette lettre va-t-elle à l’encontre du masque composé par Mme de M. ? Selon vous, pourquoi l’écrit-elle à Valmont ?
  • Qu’apprend-on de la place de la femme au sein des élites sociales au XVIIIe siècle ?


Pour lundi 15 décembre : 
Lire la Princesse de Montpensier (disponible ici), en vue d'une interrogation de lecture (comparative avec le film de Tavernier, qui sera visionné en partie vendredi 12)

Mardi 16 décembre :
Préparer la lecture analytique du texte 7, l'incipit de La Princesse de Montpensier (au dos de l'extrait de la lettre 81 des Liaisons dangereuses) en vue d'une présentation à l'oral en binôme, à la façon d'un cours. Vous pourrez vous demander quels sont les éléments qui se mettent en place dans cet incipit.

Vendredi 19 décembre :
Oraux blancs (1h30) et fin du visionnage de Tavernier



lundi 8 décembre 2014

dimanche 7 décembre 2014

Corrigé commentaire Beckett




Voici un petit mix de trois copies : celle de Julie B., de Thomas LCT et de Cédric A.
Seule la dernière sous-partie, qui porte sur l'aspect plus "philosophique" du texte, est de moi.




                  [accroche] Les années soixante voient le déclin des Trente Glorieuses, entraînant ainsi une vague de pessimisme face à l’incapacité des populations à se projeter dans le futur. En littérature, tout le XXe siècle est marqué par des mouvements littéraires nouveaux et expérimentaux, comme le surréalisme ou l’absurde. Ce dernier mouvement connaît un grand succès au théâtre, notamment avec des auteurs comme Ionesco, Adamov ou Beckett. [présentation de l’auteur et de l’extrait] Samuel Beckett est un dramaturge moderne anglais qui écrit en 1963 Oh les Beaux jours.  Notre commentaire se focalisera sur le début de l’acte I de cette pièce. La didascalie initiale met en place deux personnages, Willie et Winnie, dans un lieu apparemment inconnu et non identifié. Winnie prend longuement la parole, avant que Willie ne la coupe. [problématique] Ainsi, nous pouvons nous demander comment, par l’intermédiaire de la parole solitaire d’un personnage, le dramaturge propose une vision pessimiste et absurde de la condition humaine. [annonce du plan] Nous verrons d’abord en quoi ce faux « monologue » est pathétique, avant de nous intéresser à la vision absurde de la finitude humaine peinte par l’auteur.

***

                  [Rappel de l’axe et annonce des sous-parties] Ce monologue fait figure d’appel à la pitié. Ce côté pathétique est souligné par la solitude du personnage, couplée à son besoin de sentir la présence de Willie qui l’accompagne, et il est renforcé par le rythme lent du monologue.
                  [Annonce de la sous-partie 1] Tout d’abord, ce monologue provoque la pitié, car on sent un personnage esseulé. [argument 1 : étude d’un procédé d’écriture avec citation du texte] Winnie aimerait être entendue par Willie, mais ce dernier ne semble pas prêter une oreille attentive au discours de sa femme, comme l’indique la répétition de négations restrictives couplées aux verbes de parole et d’écoute : « n’entends pas » (l.3), « n’entends rien » (l.4), « tu ne réponds pas » (l.6) ou encore « tu ne parles pas » (l.7). [interprétation du procédé] Ce manque de communication souligne la solitude du personnage de Samuel Beckett. [nouvel argument] La solitude est aussi marquée par des propos soulignant l’absence de vie alentours, comme le montrent les expressions « sans âme qui vive qui entende » (l.2) ou « le désert » (l.8). Cette dernière expression met en lumière la solitude de Winnie dans le texte, en comparant le silence de Willie à une plaine désertique sans signe de vie. On remarque aussi que Winnie en vient à se parler toute seule pour combler sa solitude ; on relève ainsi à la ligne 7 le nom propre « Winnie » et le pronom personnel « tu », associés à des verbes conjugués à la deuxième personne du singulier : « tu te fais entendre », « tu ne parles pas toute seule ». Pourtant, il semble bien que ce personnage soit seule face à elle-même, car Willie la laisse dans sa solitude.
                  [Annonce de la sous-partie 2] En effet, Willie ne répond pas aux inquiétudes de Winnie, ce qui lui fait éprouver une angoisse plus forte encore. Ainsi, elle s’inquiète pour le jour où elle sera vraiment seule, comme le montre l’expression « depuis le moment où ça sonne pour le réveil au moment où ça sonne pour le sommeil » (l.13/14). Ce parallélisme de construction, bâti sur l’antithèse entre réveil et sommeil, a pour effet d’insister sur le sentiment de solitude qui dure du matin au soir. Cette peur d’être seule est liée chez Winnie à la peur de la mort, qu’elle évoque à plusieurs reprises dans le texte, par exemple avec le verbe « mourir » (l.10) ou le groupe nominal « dernier soupir » (l.16).
                  [Annonce de la sous-partie 3] Enfin, les nombreuses pauses effectuées entre chaque phrase, pauses marquées par la répétition de la didascalie interne « un temps », créent une certaine musicalité et ajoutent une dimension pathétique au monologue de Winnie. Les didascalies des lignes 24 à 26 en particulier, ces hésitations dans l’attitude à adopter chez le personnage, relèvent à la fois du comique de situation et du pathétique. Le personnage semble réellement perdu, abandonné, ne sachant que dire ou faire pour que son compagnon réagisse.
                  [bilan de la partie et transition] On peut donc dire que ce monologue est pathétique par l’idée de solitude, par la peur de Winnie d’être abandonnée, et par le rythme lancinant qu’instaurent les didascalies. Ce pathétisme permet au dramaturge de proposer une vision absurde de la condition humaine, comme nous allons le voir à présent.

***

                  [Rappel de l’axe et annonce des sous-parties] Tout au long de son monologue, Winnie amène le spectateur à réfléchir directement ou indirectement à sa propre condition humaine, par l’intermédiaire de son attitude incohérente, de son rapport à Willie ou encore de la futilité qui semble la caractériser.
                  [Argument 1] Le personnage de Winnie est assez incohérent ; elle est en effet capable de passer de la recherche de son peigne à un raisonnement sur la nature humaine. On le remarque notamment dans l’accumulation de la ligne 23 : « On fait tout. Tout ce qu’on peut. Ce n’est qu’humain. Que nature humaine. Que faiblesse humaine. Que faiblesse naturelle. » Ce raisonnement se suit grâce au parallélisme d’une phrase avec la suivante, et amène le personnage à constater la faiblesse de notre nature, notre fragilité, liée entre autre à notre finitude. Mais Winnie repart aussitôt dans la recherche de son peigne. Elle utilise alors deux antithèses, renforcées par un parallélisme de construction, à la ligne 27 : « Pas trace de peigne. Pas trace de brosse. Le peigne est là. La brosse est là. », qui traduisent un comportement quelque peu irrationnel. De plus, alors que l’on s’attend à une remise en question de Dieu à la ligne 38, alors que Winnie proclame « A Dieu et à moi », elle ne semble finalement réfléchir qu’à la tournure de la phrase (« Peut-on dire… ? »). Ainsi, Winnie semble représenter ici l’Homme, capable de grande chose comme des plus futiles.
                  [Argument 2] La question de l’Homme, d’ailleurs, est mise en avant dans le rapport qu’entretient Winnie avec Willie. En effet, même s’il ne dit qu’un mot, Willie est très présent dans la scène, car constamment évoqué par Winnie. On voit vite qu’elle a besoin de lui, dès la ligne 1, lorsqu’elle avoue « Si seulement je pouvais supporter d’être seule ». Elle imagine la mort de son compagnon et pense ne pas pouvoir y survivre, comme si Willie était sa seule raison de vivre, « ce qui permet de continuer » (l.9). Winnie, encore une fois, semble être le porte-parole de l’Homme, et énoncer notre peur de vivre sans les autres, notre besoin d’être entouré pour affronter l’inquiétude que représente notre finitude.
                  [Argument 3] En effet, c’est bien de cette inquiétude de la mort dont il est question dans le texte de Beckett, et de l’absurdité de notre condition humaine, nous qui venons au monde pour finalement le quitter. Ainsi, l’espace et le rapport non réaliste des personnages à cet espace est une métaphore d’une vie engluée dans le non-sens, ce que prouvent aussi bien la didascalie initiale que la photographie de la mise en scène de Jean-Louis Barrault l’année de la création de la pièce. De plus, comme souvent dans le théâtre de Beckett, les personnages semblent être des figures assez grotesques représentant une humanité sans espoir, qui se contente de passer le temps en attendant la mort (l.12/14). En effet, nous pourrions nous demander, comme Winnie, « que faire ? ». Cette question met en évidence la limite de l’action humaine, son inutilité. « Il y a si peu qu’on puisse faire, ce n’est qu’humain. Que faiblesse humaine… » Les formules restrictives révèlent bien notre incapacité à échapper à la mort. Nos actions sont dérisoires, comme le prouvent, de manière symbolique, toutes les actions qu’effectue Winnie avec son sac à main, à la recherche des objets qu’il contient, tous utiles pour préserver sa beauté. Mais à quoi bon ? Un jour, comme l’annonce Willie, elle aussi dormira sous le mamelon de terre, s’étant tue. Enfin…
                  [bilan de la partie] Ainsi, le dramaturge, par l’intermédiaire d’un personnage agissant de manière illogique en apparence, nous livre-t-il une vision pessimiste et absurde de la condition humaine.

***
                
[conclusion] Notre étude nous a donc amenés à étudier l’aspect pathétique de ce faux monologue, dans un extrait qui s’achève sur l’injonction de Willie à se taire. Les paroles et les gestes parfois incohérents de Winnie semblent traduire la vision absurde et pessimiste de Beckett quant à notre condition humaine. Beckett nous présente une pièce où le dialogue semble devenir impossible. Parler ne revient plus à communiquer et Willie se contente par instants de grogner pour répondre à sa femme. Parler devient alors une activité qui maintient en vie en attendant l’enlisement complet qu’est la mort. [ouverture] Ionesco lui aussi, autre auteur du théâtre de l’absurde, écrira une pièce sur cette peur de mourir inhérente à l’Homme, Le Roi se meurt, parue l’année précédant Oh les Beaux jours.

Question sur corpus / 1e ES1





Conseils méthodo
  • Commencer par une accroche sur le thème commun, pas sur la présentation du corpus.
  • Pas de « texte 1 », « texte 2 »...
  • Pas de rappel des dates d’écriture des textes, surtout pour les comparer.
  • La question posée doit être reprise telle quelle dans votre introduction. Se demander « Pourquoi les hommes sont seuls », ce n’est pas la même chose que se demander « Que cherche à montrer le théâtre contemporain de la condition humaine en utilisant le monologue ? »
  • Interpréter les textes, ne pas les étudier dans la précision de leurs procédés d’écriture (rôle du commentaire littéraire).
  • La photographie de la mise en scène n’est pas suffisamment, ou pas bien analysée.

 Sur ce corpus précisément

  • Le corpus vous imposait de vous interroger sur la notion de "monologue", que vous avez été beaucoup trop peu à questionner. 
  • Un seul d'entre vous a précisé qu'il ne s'agissait pas réellement de monologues, vu que les comédiens n'étaient pas vraiment seuls en scène. Ce qui donne à ces tirades l'aspect de monologue, c'est que les trois personnages semblent se parler à eux-mêmes, ils n'obtiennent pas de réponse à leur discours. Ils parlent comme "dans le vide". Cela aurait été pertinent de vous interroger sur ce point, au moins pour le dire en introduction de la question sur corpus.
  • La question vous amenait à vous interroger sur l'image de la condition humaine que proposent ces "monologues" ; en d'autres termes, comment les Hommes sont-ils présentés dans ces textes, quels sont leurs sentiments, qu'éprouvent-ils, que cherchent à dire les auteurs de la condition de l'Homme ?
    Ici, il était impossible de passer à côté de la notion de solitude, inhérente à tous les extraits. Vous auriez également pu vous attarder sur le côté pathétique de l'Homme proposé par les textes. Enfin, il aurait été intéressant (certains l'ont fait) de vous intéresser à la peur de mourir, d'être abandonné, de ne plus être entouré par d'autres Hommes. Ce qui peut se traduire par un puissant désir de vivre et de communiquer, au moins chez Winnie (Beckett) et chez Leslie (Koltès).





Corrigé de la question
La copie de Julie B. très, très peu modifiée
 


Le théâtre contemporain remet en question la condition humaine et critique aussi la société dans laquelle nous vivons. Le corpus soumis à notre étude est constitué d’extraits des pièces Oh les Beaux jours de Samuel Beckett, Papa doit manger de Marie N’Diaye et Sallinger de Bernard-Marie Koltès. Le corpus propose aussi une photographie de la mise en scène de Oh les Beaux jours par Jean-Louis Barrault, représentée en 1963. Toutes ces pièces sont parues au XXe siècle, hormis celle de M. N’Diaye, publiée en 2003, et proposent des scènes constituées de faux « monologues », des personnages se parlant à eux-mêmes dans de longues tirades. Nous pouvons donc nous demander ce que cherche à montrer le théâtre contemporain de la condition humaine par le monologue.


La solitude, sentiment renforcé par l'usage du monologue, tient une grande place dans ces textes. Winnie, dans la pièce de Samuel Beckett, à travers un monologue introspectif, montre qu’elle se sent très seule. Elle utilise le pronom personnel « je » de très nombreuses fois, et affirme ne pas pouvoir supporter « d’être seule » (l.1). Cette idée est renforcée par le champ lexical de la mort, comme on le voit ligne 10 « mourir », ou ligne 16 « dernier soupir ». Le personnage de Leslie dans Sallinger se sent lui aussi très seul après la mort de son frère. Il veut « entendre une autre respiration, écouter un autre cœur qui bat » (l.12). Ce besoin de contact humain révèle chez ce personnage une grande solitude. L’extrait de Papa doit manger diffère quant à lui par le contexte. En effet, le personnage seul dans ce texte est le père qui a abandonné sa famille. Cette solitude se caractérise par l’aspect physique, comme le prouvent les expressions « face détruite » (l.5), « maigre » (l.6), ou encore « pauvre » (l.7).Enfin, la photographie de la mise en scène de Oh les beaux jours présente une femme seule, confinée dans un mamelon de terre. Le fait qu’elle soit enfermée insiste sur le fait qu’elle est seule. Ces textes présentent donc une véritable solitude ressentie par de nombreux personnages.

Néanmoins, elle est contrastée par une réflexion sur la vie et sur l’envie de vivre très présente. Winnie, le personnage de Samuel Beckett, réfléchit sur sa vie sans Willie : « Qu’est-ce que je ferai » (l.11/12), mais souligne son envie de vivre, assimilée à celle de parler, à la ligne 9 : « ce qui permet de continuer ». Leslie, dans la pièce Sallinger, fait preuve d’une envie de vivre très marquée, qui se caractérise par une violence qui semble parfois même être de la folie. En effet, il dit vouloir « aboyer » (l.6), « sortir mon flingue » (l.6), « courir dehors » (l.8). Les personnages de ces différents textes proposent ainsi une véritable réflexion sur la vie et sur la condition humaine.


En conclusion, on peut dire que la solitude ressentie par ces trois personnages est souvent accentuée par une réflexion sur la vie en général, et sur le désir de vivre en particulier. Le théâtre contemporain cherche donc à montrer le contraste par lequel les être humains sont habités.


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mardi 25 novembre 2014

Les Liaisons, lettre 141


Lettre 141, Les Liaisons dangereuses


Intro / situation de la lettre

Quatrième partie du recueil, mise en place de l’engrenage tragique final. Lettre adressée par la Marquise, piquée dans sa jalousie, au Vicomte de Valmont, qu’elle sait être tombé amoureux de la présidente de Tourvel.
Lettre 139 : la Présidente de Tourvel fait part à Mme Rosemonde (tante de VV) de sa joie, de son bonheur d’être aimée et d’aimer VV.
La lettre précédente (140), écrite par le vicomte à la marquise, revient sur la fausse couche de Cécile, et annonce une possible réconciliation entre les deux libertins il aura les preuves d’avoir fait céder la Présidente ; la MM devrait donc lui accorder une nuit d’amour). Lettre qui fait par ailleurs état d’une tension grandissante entre les deux libertins. Elle se termine sur le reproche de silence de la marquise, et sur cette expression « rancune tenante » (à mettre en lien avec le « sans rancune » de la lettre 4).

La lettre 141, objet de notre analyse, est une lettre à l’énonciation complexe, qui peut être divisé en plusieurs parties :
1)     Les reproches de la marquise au vicomte
2)     La petite histoire (l’apologue libertin)
3)     La lettre dans la lettre
4)     Les formules de clôture


Problématiques possibles :

·       En quoi cette lettre annonce-t-elle le dénouement funeste ?
·       Etudier la lettre dans la lettre
·       Quelle vision des libertins cette lettre propose-t-elle ?


Plan détaillé


I.               Les rapports entre les deux libertins / La guerre des libertins

1)     Une marquise agacée

·       Enonciation : nombreux « je » vs. « vous » qui oppose la MM au VV
·       Agacement et exaspération de la MM marqués par les exclamatives et les interrogations rhétoriques
·       Des menaces (« Prenez –y garde, Vicomte ! » / « Vous y trouverez aussi mon ultimatum »), qui trouvent leur mise à exécution dans la 153 (« La guerre ! », écrit par la MM, comme simple réponse en bas d’une lettre de VV)

2)     La dépréciation du vicomte de Valmont

·       Un homme ayant des conquêtes faciles : cf. champ lexical « saisir toutes les occasions qui vous paraîtraient agréables ou faciles » / « avec la première venue » / « ce que vous aviez fait mille autre [fois] par occasion »…)
·       Un homme qui ne sait pas aimer : « tyran » ou « esclave », homme qui ne maîtrise pas ses sentiments et ne sait honorer les femmes. Cf. parallélisme de construction qui permet ‘insister sur cette antithèse : « jamais vous n’êtes ni l’Amant ni l’ami d’une femme ; mais toujours son tyran ou son esclave ».
·       Un homme ridiculisé : la MM se moque de VV en reprenant dans sa lettre des passages de la lettre précédente qu’il lui a adressée (les citations en italique dans la lettre), en ridiculisant ses expressions (elle utilise l’ironie, qui se perçoit grâce aux italiques)

3)     L’affirmation de la marquise

·       Une marquise sûre d’elle : nombreux adverbes « bien » qui viennent appuyer un discours fait d’affirmations péremptoires : « Assurément / je ne doutais même pas / je ne suis pas surprise / je crois / à la vérité / Ma comparaison me paraît d’autant plus juste que… / Aussi suis-je bien sûre… »)
·       Le refus d’en dire plus : dans sa lettre précédente, VV reproche à MM son silence, et en effet, toute la lettre 141 consiste à la marquise à dire sans dire ! Cf. les occurrences des termes silence » et des verbes « dire » (« Que vous importe mon silence ? /il m’en coûte de vous les dire. / Que voulez-vous donc que je vous dise… / Je ne vous ai jamais dit… / etc. »)
Finalement, c’est par le subterfuge des paroles d’une autre (voir l’apologue, la petite histoire), qu’elle va malgré tout dire à VV ce qu’elle pense de la situation
·       Le récit enchâssé (la lettre dans la lettre) : une comparaison trop évidente pour que VV, et le lecteur, soient dupe : il s’agit bien d’un récit concernant directement les deux libertins en présence. Rendu plus perceptible par les formules de généralité employées par la MM : « Un homme de ma connaissance… / une femme qui lui faisait peu d’honneur… / Cet homme avait une amie… »


II.              La lettre dans la lettre, ou le libertinage tragique

1)     Un ton désinvolte en apparence

·       La mise en place de l’apologue : un récit à valeur d’exemple
·       Le refrain lancinant (« Ce n’est pas ma faute »), qui transforme cette lettre d’une grande cruauté en petite chanson
·       Le vocabulaire amoureux (« Mon Ange (x2) / aventure / une femme que j’aime éperdument ») et l’injonction légère à prendre un autre amant, qui dévalorise l’histoire d’amour (impératifs, majuscules aux termes Amant et Maîtresse, style plat, presque ridicule : « Crois-moi, choisis un autre Amant, comme j’ai fait une autre Maîtresse. Ce conseil est bon, très bon ; si tu le trouves mauvais, ce n’est pas ma faute. »)

2)     Mais une grande cruauté dans le fond

·       La présidente présentée comme femme facile : « j’ai eu juste autant d’amour que toi de vertu, et c’est sûrement beaucoup dire » : comparaison dépréciative entre amour de VV et vertu de Présidente de Tourvel
·       La présidente comme principale fautive du désintérêt de VV : « quatre mortels mois » (hyperbole), « ton impitoyable tendresse » (oxymore), « la Nature (…) donnait aux femmes l’obstination »
·       Le sacrifice d’une femme : Quand on connaît la vertu et le caractère pieux de la présidente, on peut bien sûr comprendre quelle réaction ce courrier pourra susciter chez elle, et elle apparaît alors comme une femme sacrifiée pour l’orgueil des libertins. Il s’agit d’une véritable mise à mort de la présidente (« Je n’ai pas perdu un moment, car la tendre missive a été expédiée hier au soir », précise VV dans la lettre suivante)

3)     Le discours libertin

·       L’inconstance comme loi de la Nature : références constantes aux lois du monde et de la Nature, comme responsables des actions libertines (« c’est une Loi de la Nature (noter les majuscules ironiques) / si la Nature n’a accordé aux hommes… / Ainsi va le monde. »)
·       Une lettre de domination : Double jeu de domination dans ce courrier : de la MM sur VV (elle le pousse à agir contre sa volonté), et de VV sur la Présidente
·       Le début de la tragédie : Les morts sont annoncées. La présidente ne survivra pas au chagrin d’amour. La MM envoie ses condoléances pour la perte de l’enfant qu’attendait Cécile : la mort est présente, les destins sont tracés. Le VV lui-même ne survivra pas à cette histoire, et se laissera tuer dans le duel qui l’oppose Danceny au sujet de Cécile.